jeudi 29 septembre 2016

Culture : budget, arithmétique et élections

Il m'a fallu deux heures de doute, et de googlemania forcenée, pour comprendre. Ayant ouï tôt ce matin, sur France Musique, que le budget de la Culture augmenterait de 5% et atteindrait 10 milliards d'euros, et que donc plus rien ne serait comme avant, j'ai considéré cela comme une bonne nouvelle.
En me penchant sur les détails, là où se cache le diable, je me trouvais renvoyé à ce que l'Education nationale me signifia jadis : ma nullité chronique en mathématiques. Pour ma défense, j'objecterai que si le budget des moyens ministériels étaient de 7.3 M en 2016, une augmentation de 5% n'atteindrait jamais les 10 M ; et comme une augmentation de 40% me paraissait peu plausible, le doute évoqué plus haut s'abattit sur moi. D'autant que les moyens de la Culture étaient aussi évalués à... 3.6 milliards.
Un commentaire de Télérama m'éclaira quelque peu : le chiffre de 10 M inclut notamment les crédits d'impôt octroyés par Bercy. Présenter l'allégement fiscal comme une subvention me parait un peu gonflé, en tout cas personne n'avait osé jusqu'à présent. Quant aux moyens effectifs de l'action culturelle, il sera bien en hausse de 5%, à hauteur de 3.6 milliards... chiffre que je comprends mieux.
On conclura finalement que seule la hausse de 5% est à retenir comme positive. Bien sûr, comme toujours, l'institution ne s'oubliera pas (+ 7% pour les musées, + 6.6% pour un pôle "Transmissions des savoirs" et "Personnels"). On peut quand même espérer quelques effets, quoique l'éducation artistique et culturelle ne nous ait jamais trop convaincu, pas plus que la multiplication des résidences d'artistes...
Très marqué à gauche, le monde de la Culture a subi ce que subissent tous les lobbies pro-gouvernementaux : réduction drastique des moyens en début de mandat, au risque d'un sentiment de cocufiage, puis relance à l'approche des nouvelles élections, où les soutiens seront les bienvenus. Gageons qu'ils seront nombreux.
Enfin, malgré les artifices et la démagogie, faisons acte d'optimisme, et retenons les propos de la ministre, présentant la culture comme "la seule réponse de long terme à la violence et à la crise que traverse notre société". Quoi de plus vrai, et pourtant je sens déjà le doute me reprendre...

lundi 19 septembre 2016

Démocratie déplumée

Il arrive que mes lectures et tel ou tel article de presse se croisent heureusement, pour le plus grand plaisir de ce qui me sert de réflexion. Ainsi dans le TéléObs de cette semaine, JC Guillebaud s'interroge fort à propos : "La liberté des médias, qui fut longtemps le principe fondateur de la démocratie, serait-elle en train de devenir son principe destructeur ?"... Il évoque la complexité du phénomène médiatique, la sémiotique et l'impérialisme de l'image, la tyrannie du profit, la défaite de la raison, l'hystérisation permanente des foules. Tout ce qui aboutit on le sait à un système fou (faute de garde-fous) et glouton, qui s'auto-alimente, qui vit de l'instant et dans l'instant, sans savoir où il va et où il est, ni comment s'organiser.
JCG pose le problème d'une hégémonie médiatique contre le journalisme, ce qui me parait accorder beaucoup de mansuétude aux "journalistes" contemporains, et se demande "La souveraineté d'une opinion hystérisée en permanence ressemble-t-elle encore à une démocratie ? Rien n'est moins sûr."  Euphémisme, dirais-je. Quant à ceux qui objecteraient à cela l'idée d'une "démocratie d'opinion", cela me fait penser à la vieille blague qui courait dans l'ancienne URSS à propos de l'expression "démocratie populaire": deux mots, deux mensonges...
Il se trouve que dans le même temps, mes lectures présentes se nourrissaient du "Bréviaire du journalisme", de Léon Daudet, paru en 1936. Ce livre, nonobstant quelques idées de l'auteur (qui à 68 ans s'était quand même bien assagi) est intéressant dans ce qu'il raconte, dans un style inimité, un demi-siècle de vie de journaliste et de la presse, fait d'investigation, de campagnes, de culture, de polémiques, de débats et...d'information. Soit à peu près le contraire de l'univers médiatique évoqué plus haut.
Les plumes ont vécu. Ainsi va le monde, et le progrès devient furieusement moderne.

mardi 13 septembre 2016

Goncourt toujours

La première sélection est connue ; on y retrouve bon nombre d'auteurs évoqués dans mon précédent billet, et pas forcément les plus attrayants. S'y rajoutent quelques poids lourds (Y. Reza) et quelques têtes connues (L.Lang, G.Faye, JB del Amo...). La parole est désormais aux éditeurs.
On notera (on, c'est-à-dire la presse régionale, qui ne voit plus guère la littérature qu'à sa propre mesure) la forte présence d'auteurs toulousains, d'origine ou d'adoption : Dubois, del Amo, Mauvignier... et Magyd Cherfi. Ce dernier, que nous aimons beaucoup et que nous respectons énormément, avoue en être tombé sur le cul. Il ne nous en voudra pas de dire que nous aussi. Car si généralement ses écrits, tout comme ses propos, sont remarquables, il est peu probable que ce soit pour ses qualités littéraires qu'il ait été retenu... Un peu instrumentalisé peut-être. Il est vrai aussi que désormais Actes sud mange à la table des grands.
Alors on suivra, si l'on en a envie, la suite du tournoi jusqu'en novembre. On pourra même en profiter pour lire quelques titres. Del Amo, depuis Une éducation libertine, s'est perdu jusque dans une mystique alimentaire de cours de récré qui, il est vrai, nourrit bien. Mais peut-être que Mauvignier ou Dubois...

lundi 5 septembre 2016

Littéraire rentrée...

Si nous n'étions à ce qu'il est convenu d'appeler la rentrée, je ne vous entretiendrais pas de celle que l'on nomme littéraire. Mais il se trouve que, comme on dit dans les media populaires, l'actualité commande.
On sait que 560 livres vont éclore, un peu moins que d'ordinaire ; on sait aussi que quelques uns seulement trouveront un espace médiatique, selon les vertus et l'engagement (on n'ose écrire l'engagement des vertus) des attaché(e)s de presse respectifs.
A l'heure qu'il est, c'est cette partie émergée de l'iceberg que je survole au hasard de la critique, pour saisir quelques impressions, approximatives, fugaces ou subjectives. Laissons de côté les livraisons systématiques d'ouvrages sans intérêt, et notons (hi hi) que quelques auteurs méritent a priori notre curiosité : L.Mauvignier, T.Benacquista, B.Duteurtre, JP.Dubois, A.Makine, M.Bernard...
D'autres, comme K. Tuil, nous laissent songeur : politiquement pas trop correct, nous dit-on, mais aussi construit sur un fatras de pathos et de sociologie contemporaine à deux balles... A voir.
D'autres encore semblent se noyer dans des oeuvres (?) incrédibles (Joncour), abreuvées de pathos individuel (N. Herpe, C. Cusset) ou diluent un certain talent dans les arcanes du marketing (R.Jauffret, M.Arditi, L.Duroy, Ph. Vasset...).
J'ai déjà écrit que, dans ce qu'on peut appeler littérature, le livre dépassait l'histoire des personnages pour conter quelque chose de l'histoire de l'humanité. Chacun appréciera les ouvrages proposés J'avoue pour ma part douter parfois de l'humanité supposée que certains décrivent. Heureusement ils le font sans style aucun et, tels le saumon ou la truite, remontent vers leurs origines pour revenir là où ils sont nés : dans le néant.