lundi 28 janvier 2019

Régis Debray et la frontière

Les hasards (un peu relatifs quand même) d'un travail littéraire m'ont amené à relire le petit Eloge des frontières de Régis Debray, publié en 2010 chez Gallimard, qui est une petite merveille de réflexion, de rhétorique et de littérature.
Ce livre d'une centaine de pages reprend le texte d'une conférence donnée à Tokyo, dans lequel le philo-médiologue aborde la question des frontières ou plutôt, fondamentalement, de la frontière. Non pas au sens douanier du terme, ni même au sens politique, mais en tant que limite et démarcation. Il fustige la commode "lâcheté" à la mode qui voudrait que l'humanité vivrait mieux sans frontières, et il démonte la vanité et la vacuité du village global fantasmé, fait d'errance et de transparence. "La frontière survit à sa métamorphose", nouvelles et anciennes frontières se créent ou se recréent, "Le trait culturel ne fait pas de bruit mais traverse le temps", le constat de Régis Debray est implacable.
Bien au delà de la "manie colonisatrice" qui transforme les frontières en affrontement potentiel, l'auteur plaide pour une idée de frontière ou limite qui permet à chacun de vivre libre sur son territoire, avec ses moeurs et sa culture. "Pour se dépasser mieux vaut commencer par s'assumer". Plutôt que de risquer un retour du refoulé, encensons la richesse et la diversité des cultures, au lieu de vouloir systématiquement les mélanger...

lundi 21 janvier 2019

Houellebecq, démon d'avant minuit......

Est-il convenable de voler au secours du succès ? Est-il nécessaire de rajouter un papier sur Houellebecq ? Chacun jugera. Pourtant c'est ce que je vais faire. A une époque où la dictature du bonheur et de l'optimisme, gros marché s'il en est, rejette toute production un peu pessimiste, le livre de Michel Houellebecq offre, comme à chaque fois et paradoxalement, une bouffée d'air pur !
Car on retrouve dans Sérotonine (Flammarion) les ingrédients habituels de doute existentiel et de sinistrose, avec peut-être un peu moins de sexe (la chute de libido du narrateur expliquant sans doute cela) et, me semble-t-il, autant de désespérance et un peu plus de noirceur. On y retrouve sa marque de fabrique, les humeurs d'un mâle blanc occidental à la dérive  incapable d'aimer et d'être aimé ; le tout se déroule, notamment, sur fond de crise de l'agriculture contemporaine, et ceux qui connaissent un peu le sujet apprécieront la perspicacité de l'ingénieur agronome Houellebecq, qui voit et écrit juste.
J'évoquais à son propos, en 2015, pour Soumission, sa vision s'une société orpheline et agonisante, acculturée et déshumanisée. Sérotonine est dans le même ton amer et douloureux. Heureusement, au milieu des larmes il y a toujours l'humour de l'auteur, qui rend possible de survivre à la lecture du livre...
Alors oui les livres de M.H. peuvent être inégaux mais ils ont fait une oeuvre. Et c'est cette oeuvre, même si l'on n'est pas un fanatique de Houellebecq, qui fait de la sortie d'un nouveau titre un vrai évènement.

samedi 12 janvier 2019

Rambaud le Magnifique

Parvenu à la grande notoriété avec le Goncourt 1997 pour La Bataille (Grasset), le graphomane Patrick Rambaud, académicien Goncourt depuis 2008, est resté au premier plan avec notamment ses Chroniques annuelles sur les présidents de la République, depuis Chronique du règne de Nicolas 1er en 2008 aussi. Nous en sommes aujourd'hui à Emmanuel le Magnifique (Grasset).
Pour qui aime la littérature (il en reste) et la politique (encore quelques uns), le travail de Patrick Rambaud est un régal. Car il connait bien la politique, son monde, ses a-côtés et ses hors-micro, et sous  l'humour sa posture critique et cultivée est celle du collaborateur du Canard Enchainé qu'il est. Son regard est incisif et mesuré, il ne prétend jamais à l'objectivité, au contraire, mais à l'honnêteté. Vis-à-vis de Macron il  en est de même : sa plume est souvent féroce vis-à-vis du Manager maximo, mais en même temps non dénuée de tendresse pour un personnage, au sens théâtral du terme, qui est lui-même cynique mais aussi parfois trop cultivé pour ne pas être maladroit sinon naïf, et trop seul pour ne pas être vulnérable. Rambaud y voit un effet de l'éducation chez les Jésuites...
Patrick Rambaud n'a pas la réputation d'être consensuel ni mondain, ce qui ne veut pas dire qu'il ne soit pas sympathique. Il n'est pas toujours tendre avec les choix du Jury auquel il appartient, qui selon lui privilégie des options "grand public", ni flatteur envers ses collègues : voir dans l'Obs du 3 janvier comment il exécute l'enflure Eric-Emmanuel Schmidt.
Reconnaissons à Rambaud, en sus de son talent littéraire, d'avoir entretenu une certaine intégrité, chose de plus en plus difficile et donc rare. Dans ses attitudes comme dans ses divers écrits, il est un homme honnête.

mardi 8 janvier 2019

Libertés de la presse

Il n'est pas nécessaire de posséder une grande culture politique ou historique pour savoir que la liberté de la presse est un des garants fondamentaux et très symbolique de ce système, le pire à l'exception de tous les autres, que l'on nomme démocratie.
C'est sans doute pour cela que le triste anniversaire de la tuerie de Charlie Hebdo a permis de rappeler cette évidence, et l'on ne peut que se réjouir que la grande masse des français y souscrivent.
Or dans le même temps, aux quatre coins des rond-points, la même vindicte -injures, crachats, coups, destruction de matériel, blocage de la diffusion...- s'abat sur ceux qui couvrent l'action des gilets jaunes. Journalistes ou correspondants, PQR ou télévision, de BFM à France 3, du Bien Public à Ouest-France, tous sont agonis par ceux-là même qui leur doivent beaucoup de l'impact de leur mouvement mais qui n'acceptent pas qu'un journaliste puisse présenter les faits avec un peu de recul, et soit autre chose qu'un porte-parole de leurs frustrations. Pourris, vendus, collabos, ... le vocabulaire survit aux décennies qui passent.
On me dira qu'il ne faut pas tout mélanger. Certes BFM n'est pas Charlie Hebdo, loin s'en faut, et la presse a sa propre logique institutionnelle, souvent proche de ses intérêts financiers : je ne suis pas dupe du discours ou des pratiques des media. Pourtant c'est cette presse, plus diverse qu'on ne le dit, qui tant bien que mal informe, et démontre aux apprentis-totalitaires immatures et de tout bord que leur nombril n'est pas seul au monde.
Alors ne mélangeons pas tout, certes, mais des temps s'annoncent peut-être qui ne sont pas rassurants.

vendredi 4 janvier 2019

Bonne année !

Nous y  sommes ! En 2019...
Alors, chers contemporains, comptant pour deux ou comptant pour rien, recevez mes meilleurs voeux. De réussite, de santé, de bonheur, d'amour, de lectures...
Et si ça ne se passe pas comme espéré, ne m'en veuillez pas trop.
Avant de faire le bilan de l'année éc(r)oulée, profitons de cette heureuse période de bonnes perspectives...
Alors... Bonne Année !