jeudi 9 février 2017

Canteloup, matraque et démocratie

La mode est à présent à ce que l'on croyait révolu depuis les heures des grands procès des dictatures communistes : avouer ses fautes en se couvrant de cendres publiquement. Ce matin jeudi, sur Europe 1, c'est Nicolas Canteloup qui se flagelle : "C'est moi qui mérite un coup de matraque sur les doigts ". Son sketch était "très très très très nul" (sic). Son voisin de studio, le Monsieur Loyal de l'émission, Thomas Sotto, le réconforte : "Je voulais t'embrasser plus fort que d'habitude !". Il parle de "belle chronique" et celui qui la veille trouvait le sketch "consternant"conclut : "Tu es un mec bien ! Bravo à tes auteurs !"...
Mais de quelle sordide vilénie l'imitateur s'était-il donc rendu coupable ? Un jour plus tôt, en relation avec un fait divers à Aulnay (ou un jeune a été violé par la matraque d'un policier) et imitant la voix de François Hollande, il avait osé, entre autres fredaines du même tonneau, "Pour Théo, j'ai rendu possible le mariage gay. Après l'épisode de la matraque, si Théo se découvre des sentiments sur le policier qui lui a introduit la matraque, ils pourront grâce à moi s'épouser". La polémique avait démarré sur le champ.
Alors oui, la vanne est nulle, facile, grasse et vulgaire. Même si faire rire tous les matins demande trop d'inspiration pour être toujours désopilant, il est des commodités à éviter. Cela étant, que lui reproche-t-on ? Si c'est le mauvais goût du propos, fort bien, mais on ne sache point hélas que cela soit interdit, sans quoi des centaines d'animateurs (?) de télé-réalité dormiraient depuis longtemps en prison, Cyril Hanouna en tête.
Sachant que la victime du fait divers d'Aulnay n'était pas offensée, se pourrait-il que ce soit une communauté qui se soit sentie "blessée" ? C'est probable, mais au fond peu importe. On constatera une fois encore que dès lors que quelqu'un n'aime pas l'expression d'un autre, il se déclare volontiers victime et entend faire taire cet autre. S'instille peu à peu ce poison moraliste qui, par la censure ou l'auto-censure, entend définir l'espace de l'expression. Même le bouffon que toléraient les monarques les plus autocrates n'a plus sa place dans la société, pavée de bonnes intentions, dont rêvent certains. Comme je l'ai souvent écrit ici, les formes nouvelles du fascisme seront plus insidieuses que celles du XXème siècle...

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