samedi 28 mars 2020

Temps libre, châteaux de cartes et tours d'ivoire...

Un jour viendra où cela s'arrêtera. Sur quel bilan, on l'ignore ; avec combien de cercueils, enterrés ou brûlés à la sauvette ? combien de victimes chez les soignants, qui engagent leurs vies quand des syndicalistes à l'emploi garanti prônent le droit de retrait à tout propos ? quelles conséquences humaines lors de la longue crise économique qui suivra ? On entend déjà une populace, revenues des rond-points ivre de ses récentes compétences en épidémiologie, qui braille "Il faudra rendre des comptes !" avec une gourmandise qui rappelle quelques belles épurations comme le XXème siècle en connût...
Alors, auront enfin cessé ces pathétiques "journaux de confinement" et autres théâtralités narcissiques qui pourrissent notre quotidien quand on goûterait le silence et la pudeur. Mais, même pendant les guerres, les affaires et la com' continuent...
Des chateaux de cartes s'effondreront. Le mythe d'une Europe où l'ouverture, la libre circulation et l'austérité étaient le meilleur rempart pour garantir les sécurités : comme l'a dit Hubert Védrine, l'idée de cette Europe était conçue pour un monde sans tragédie. Résultat, l'Italie, premier pays européen touché, est à nouveau ravitaillé en masques par la Chine, le premier convoi ayant été volé par les Tchèques... S'effondrera aussi le mythe du "meilleur système de santé au monde", comme l'armée française fut la meilleure armée du monde... jusqu'à 1940.
Derrière ce château de cartes là, vacillera peut-être en France la tour d'ivoire de la nomenklatura médicale, plus courageuse pour s'attaquer à l'homéopathie ou à la psychanalyse que pour prendre dans l'urgence des décisions un peu risquées, dès lors que les procédures sont bousculées. En espérant qu'aucun scandale ne viendra accréditer les délires complotistes...
En attendant soyons reconnaissants envers les soignants de terrain. Et restons confinés. La plupart des gens s'en lamentent. Il me souvient que l'idée la plus "sociale" de la gauche arrivant au pouvoir en 81 avait été la création d'un... Ministère du Temps libre ! Quarante ans plus tard, le consommateur ne sait plus qu'en faire. Misère des temps.

dimanche 22 mars 2020

Delfeil de Ton, souvenirs et cerveau disponible

On le sait, le confinement exacerbe la créativité. D'une part dans les media, qui sollicitent des chroniqueurs pour témoigner de cette situation inédite. Et d'autre part, bien sûr, chez lesdits chroniqueurs. Ainsi, le Monde sollicite Eric Chevillard, et Bibliobs publie Delfeil de Ton. Imaginez mon plaisir, à moi qui après avoir été abonné (avec plaisir) au Nouvel Obs pendant plus de vingt ans, n'ai maintenu plusieurs années cet abonnement à l'Obs que pour la seule satisfaction de lire DDT.
Delfeil de Ton, ancien de Hara-Kiri et de Charlie Hebdo, fait partie de ces trublions de 68 qui ont bien vieilli, à la fois fidèles à eux-mêmes et lucides sur la réalité du monde qui va, et de ses illusions. Bref ils ont grandi et mûri, sans se renier, ce qui, quoi qu'on puisse penser de leurs écrits, est assez rare.
Je vous conseille donc d'aller sur le site Bibliobs et de lire "Souvenirs de papier" et la série des "Rigolons-en" : on y trouve, pour toutes les raisons que je viens d'écrire et dans le style inimitable de DDT, quelque chose de haut et d'intemporel.
Cette semaine a vu également le confinement définitif de Patrick Le Lay, ancien PDG historique de TF1. Difficile donc de rédiger le moindre embryon de note nécrologique et consensuelle à propos de l'inventeur de la télé moderne. Pourtant, si Le Lay a droit dans mon jugement à des circonstances atténuantes, c'est de par son attachement à son identité bretonne ("On n'a pas le droit de tuer une langue, surtout quand elle est plus ancienne que la langue dominante", et surtout pour sa phrase mythique "Ce que nous vendons à Coca Cola c'est du temps de cerveau disponible". A l'époque j'avais trouvé cette phrase merveilleuse d'esprit de synthèse et de cynisme assumé. Et la levée de boucliers qui a suivi ne lui a d'ailleurs pas fait perdre le moindre téléspectateur : il  connaissait bien ses clients...
Je suis content aujourd'hui de lire que cette phrase est "'éblouissante", et c'est sous la plume de Delfeil de Ton...

jeudi 19 mars 2020

Huis clos

Voilà. Nous sommes tous confinés.
Cette mesure, quelle qu'en soit l'efficacité, reste le seul moyen de faire quelque chose contre la pandémie, donc ne barguignons pas et respectons les consignes.
Nous voilà donc assignés à résidence pour quinze jours (éventuellement renouvelables, comme on dit pour les contrats de travail à durée déterminée) ; la période pourra faire office d'expérimentations de toute nature, sociales, professionnelles, familiales, culturelles, amoureuses... Si l'on est optimiste, on se plaira à imaginer la (re)découverte de la lecture, de la musique, des arts, et aussi de l'Autre. Si l'on est réaliste, on pronostiquera l'envol des audiences télé, des zéros sociaux, de Youporn, des viralités complotistes... Nous verrons (les survivants, du moins).
Notre époque ne craint rien tant que l'incertitude, à l'image de la Bourse. Elle ne tolère pas ce qui échappe à sa toute-puissance rationnelle. L'insécurité génère vite l'affolement, la sur-réaction ou le complotisme si commode. On ne saurait admettre aujourd'hui ce qui nous échappe, là où nos ancêtres voyaient avec fatalité la main de Dieu ou du hasard.
L'incertitude de la période, ajoutée à celle concernant la maitrise du virus, laissera des traces ; peut-être pas, soyons optimistes, sur le plan épidémiologique, du moins historiquement parlant. Mais ses conséquences économiques, sociales, humaines... seront sanglantes. Qui s'est intéressé, voilà une trentaine d'années, à la crise de la vache folle sait bien qu'elle a provoqué davantage de suicides chez les éleveurs, par sa gestion, que la maladie de Kreutzfeld-Jacob n'a fait de victimes en tant que telle. Qu'en sera-t-il du Covid 19 ?
J'ignore si les mois qui viennent génèreront des enfants ou des divorces. Des procès, j'en prends le pari. Mais je ne sais pas davantage si nous sommes plus près de la roche Tarpéienne que du Capitole. Rien ne saura plus comme avant, nous serine-t-on à chaque catastrophe : je me souviens, lors de la catastrophe toulousaine d'AZF, combien on avait vu de belles réactions humaines... Qu'en serait-il aujourd'hui ? 
Donc, à défaut d'être modestes, soyons cons finement et espérons qu'il se trouvera des gens pour faire de ces jours un moment de nouvelle humanité. Bon courage à tous, et pensons aux plus fragiles.
Ce qui est sûr, c'est que bientôt les idées ne manqueront pas pour les auteurs de nouvelles  !

lundi 9 mars 2020

Uras : Mots et remèdes

Sur les conseils d'un ami (qui devrait se reconnaître), je suis allé à la rencontre du livre de Michaël Uras, Aux petits mots les grands remèdes (Préludes), pour découvrir à la fois le titre et l'auteur.
Tout d'abord, le livre s'est présenté enveloppé d'un bandeau promotionnel signé d'une auteure(trice) belge (tiens, tiens...) qui vend beaucoup. Mon oecuménisme passant outre, j'ai avalé les 340 pages (en version poche) présentes derrière le bandeau.
Ce n'est pas pas un ouvrage qui fera date, j'y reviendrais, mais sans doute n'était-ce pas l'ambition de l'auteur. C'est en revanche un bon moment de lecture, moment d'humour, de perspicacité et d'intelligence. Il s'agit en gros des tribulations d'un bibliothérapeute (un thérapeute qui soigne avec les livres), aux prises avec quelques clients et une relation amoureuse quelque peu brinquebalante. Cela donne un style léger et subtil, doux-amer, tendre et grave, pas sot ; des personnages bien campés ; une culture d'aujourd'hui et une critique, souvent heureuse, de notre monde. Et même si la fin est un peu faible la narration est bien soutenue.
Que manque-t-il donc au livre pour être un peu plus dense ? Probablement la faute aux injonctions de notre époque littéraire, qui pousse à l'originalité à tout prix (avec d'ailleurs ici quelques réussites), à un certain cynisme et finalement à un certain moralisme critique pas bien révolutionnaire. Il en résulte fatalement un ouvrage un peu daté qui risque de perdre un peu de son charme au fil des années qui ne manqueront pas de passer...
A titre personnel, et relativement à deux univers que je connais bien, je saluerai chez l'auteur une bonne culture de la psychothérapie, et regretterai quand même quelques clichés (sur les générations de pharmaciens par exemple, qui dans le genre mériteraient bien mieux !) mais ce sont des choses dont on se remet très vite.
En conséquence de quoi, je vous recommanderai de lire ce lire : c'est un bon moment de lecture agréable, dont on se demande pourquoi un plus gros éditeur ne l'a pas adoubé.

mardi 3 mars 2020

Salon de Martiel (12)

Amis rouergats, ou lotois, ou d'ailleurs, ou de passage, je serai présent au Salon du Livre de Martiel ce

                             Dimanche 08 Mars
                                de 10 h à 17 h

L'occasion de nous y rencontrer ?