samedi 27 février 2021

Librairies : Alleluia ! Vadre retro covidas...

C'est fait : les librairies sont redevenues "essentielles", entendez par là qu'elles pourront ouvrir en cas de reconfinement. La profession, qui avait lors du premier confinement snobé les offres du Ministère de l'Economie et préféré baisser le rideau avant de s'en mordre les doigts, qui avait, parait-il résisté avec le click-and-collect pendant le second, la profession donc s'en réjouit avec enthousiasme.

Soit. Vu la ferveur culturelle qui s'est emparée des Français depuis un an, nul doute qu'on devrait assister alors à des ruées dignes d'une promo de nutella vers ces lieux sacrés de la culture. D'ailleurs, si l'on s'en souvient bien, l'avant-Covid témoignait de cet amour des lettres qui sommeille en chacun de nos compatriotes.

Non ? Comment donc, les librairies étaient déjà à l'agonie ? surtout les petites ? L'écrit était en crise ?... On nous aurait donc menti ?

Allez, blague à part, bon vent aux libraires, qui de toute façon en auront bien besoin. Mais qu'on ne nous fasse pas prendre les vessies pour des lanternes...

mardi 16 février 2021

Culture et désenfumage (3)

Il est de bon ton, ces derniers temps, d'évoquer la culture, de la célébrer comme indispensable, tout ça... Les promoteurs de l'abêtissement général ne sont pas les derniers à emboucher ces trompettes, loin s'en faut. Il faut dire que, du moins en France, l'incantation culturelle est une tradition bien établie : non seulement parce qu'elle génère moultes royalties précieuses à l'économie nationale, mais aussi parce que les pouvoirs s'en gargarisent pour vanter leur action, dans ce qui serait encore un peu la patrie des Arts , des armes et des lois, bref un pays intelligent.

On a fait grand-cas, y compris sur ce blog, du sort réservé à toutes ces nobles activités, brutalement renvoyées à un statut "non-essentiel" face à la première crise venue. J'ai déjà montré comment derrière les chiffres bizarrement optimistes dont on nous inonde la réalité était moins reluisante, une fois le discours désenfumé. Nouvelle séquence, l'étude de la très officielle Hadopi, qui nous informe que la consommation de biens culturels dématérialisés a bien résisté, voire a été stimulée par le confinement. En clair, que les politiques publiques n'ont pas altéré la santé du secteur...

A mal nommer les choses on ajoute au malheur du monde, selon la formule de Camus. La chose se vérifie encore, si l'on se pose la question de ce que l'on entend par bien culturel. Sachez donc qu'on y trouve certes les rubriques Musique ou Films dont on peut, nonobstant leur qualité, comprendre la présence ; les rubriques Photos, Livres numériques, Presse en ligne nous paraissent déjà plus incertaines ; quant aux Séries, Jeux video et Retransmission sportives en direct (sic), on n'ose trop chercher ce qu'on peut y trouver de culturel, ce qui est bien dommage car ce sont évidemment les plus utilisées...

On comprendra donc le doute qui nous submerge. C'est pourtant avec ce type de consommation que nos gouvernants et notre grande distribution nous flattent pour se gargariser de leur propre action. Sic transit gloria mundi.

dimanche 14 février 2021

Déjà parus...

A quelques jours de la parution de mon dixième ouvrage (j'y reviendrais), une rétrospective de mes précédentes publications...

   - Les Saints des derniers jours (L'Harmattan 2018)

   - Le Répountchou qu'es aquo? (Vent Terral 2017), avec AM Rantet-Poux

   - Mona Lisa ou la clé des champs (L'Harmattan 2014)

   - Passeport pour le Pays de cocagne (Elytis 2012), avec AM Rantet-Poux

   - Aveyron Croatie, la nuit (L'Harmattan 2011)

   - Histoires peu ordinaires à Toulouse (Elytis 2007)

   - Histoires peu ordinaires au Cap-Ferret (Elytis 2006), avec Ch. Oyarbide

   - Week-end à Schizoland (Elytis 2005)

   - La Branloire pérenne (Elytis 2002)

En vente dans toutes les librairies, chez l'éditeur et chez l'auteur. Et aussi en e-book pour les titres parus chez l'Harmattan.

mardi 9 février 2021

Jean-Claude Carrière, ibi deficit orbis...

On dit qu'il est parti paisiblement, dans son sommeil. A l'image de cette sérénité qui le caractérisait. Bunuel disait de lui "C'est un petit paysan qui s'émerveille de tout ce qui lui arrive"...

On ne fera pas ici la rétrospective de son oeuvre, immense et proche des plus grands (Bunuel, Forman, Malle, Brook, Deray...), vous la retrouverez dans les journaux ou sur Wikipédia. Mais la vie de Jean-Claude Carrière est de celles qui m'ont marqué, comme je l'ai déjà écrit sur ce blog (voir Le vin bourru , juin 2017).

J'avais découvert dans ce livre les treize premières années de sa vie, dans une famille de vignerons de l'Hérault finalement contraints à l'exil. Cette enfance rurale et occitane ressemblait beaucoup à la mienne, et c'est sans doute cette émotion qui m'a conduit jusqu'à lui. Son regard n'avait rien de folkloriste, sa réflexion à la fois analytique et philosophique prenait une hauteur ensorcelante. Quand il évoque la nature, l'apprentissage, l'agriculture, la mort, les animaux, le vin, les pierres sèches qui bâtissaient son enfance, il le fait avec la simplicité, la justesse et la subtilité qui sont l'apanage des seuls grands.

Cette civilisation paysanne qui l'a construit retrouve sous sa plume une dimension qui pourrait clôre bien des débats, en renvoyant bien des modes contemporaines à ce qu'elles sont, c'est-à-dire peu de choses. Peut-être parce qu'entre celles-ci et l'altitude de Carrière il y a ce vécu, ce bagage qui s'appelle une culture et qui irriguera l'intégralité de son oeuvre.

Il va retrouver ses ancêtres dans le joli petit cimetière sur les hauteurs de Colombières-sur-Orb. Avec lui s'éteint sans doute un monde, celui où un petit paysan pouvait s'émerveiller de tout depuis l'enfance jusqu'au temps de la sagesse...

Merci Monsieur.

lundi 8 février 2021

Covid : Passent les jours et passent les semaines...

... ni temps passé ni les amours reviennent, pas plus que la vie d'avant : le Covid (ou la, si vous préférez) s'est installé et prend ses aises. Le pays reste suspendu aux statistiques, dont on sait qu'à la condition de bien choisir les items on peut leur faire dire tout et son contraire ; sans forcément souscrire à la boutade attribuée à Churchill ("Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai trafiquées moi-même") on peut toutefois s'inquiéter de la rémanence de cette dictature mathématique. Les incertitudes de la variante venue de la perfide Albion, entre autres, lui offrent les perpectives d'une belle pérennité.

Pendant ce temps, le peuple -du moins celui que je connais, rural, plus ou moins âgé, affranchi de beaucoup de connexions contemporaines- le peuple s'installe dans une lassitude un peu fataliste, dans la morosité davantage que dans la sinistrose : ces gens ne sont pas irresponsables pour autant, ils respectent les gestes-barrière et la distanciation sociale, et en bons cartésiens ils avancent masqués. Mais ils constatent et admettent, eux, que l'on ne sait pas grand chose et qu'on gouverne à vue, et que ce bouleversement risque de durer encore longtemps. Ils ne croient pas à un vaccin miracle, qui ramènerait l'insouciance et guérirait les écrouelles. Ils n'entendent pas davantage devenir épidémiologues -le pays en compte assez, ne serait-ce que sur les plateaux de télévision- mais se réfèrent à une intuition venue du fond des âges, peut-être pifométrique mais aussi fiable que bien des modélisations.

En attendant, le black-out continue à peser sur les musées, les cinémas, les salles de concert... dans ce qui est en train de devenir une exception française. On s'empile les uns sur les autres, sur les pelouses des stades ou dans les hypermarchés, mais on ne peut installer des gens dans un fauteuil sur deux ou trois. Parce ce que ce serait trop dangereux : c'est prouvé par les statistiques.