vendredi 27 mai 2022

Claude Michelet, la terre et la plume...

Claude Michelet s'en est allé, et avec lui les dernières palombes. Ce fils de ministre qui avait choisi la terre, comme il l'a écrit, aura marqué le monde du livre du XXème siècle, en réhabilitant le roman populaire. Ecrivain et paysan, auteur à succès et brebis galeuse.

Après avoir écrit pour expliquer sa propre histoire -La terre qui demeure, J'ai choisi la terre,...- il connait le succès auprès du grand public avec Des grives aux loups en 1979, suivi de Les palombes ne passeront plus l'année suivante. Remettant à l'ordre du jour la littérature populaire du XIXème siècle, il s'attire la condescendance, pour ne pas dire le mépris, du monde germanopration mais est plébiscité par les nostalgiques encore dotés de gènes ruraux, c'es-à-dire de nombreux français. Et si son oeuvre est de qualité, c'est que Michelet sait écrire mais aussi labourer, réparer un tracteur ou panser une vache, donnant ainsi une réelle crédibilité à ces "romans de terroir", comme dit la critique, davantage sans doute que ne le feront ses imitateurs.

Au delà de ses succès, il devient le principal fondateur de "l'école de Brive", avec d'autres talents (Peyramaure, Bordes,...) et avant que le genre ne se détériore avec les sempiternelles bluettes d'auteurs de sous-préfecture. Pour autant, et même si la gloire a passé, Claude Michelet aura marqué son temps ce qui, n'en déplaise à ses contempteurs, n'est pas donné à tout le monde. Saint-Libéral tiendra longtemps la dragée haute à Saint-Germain.

mercredi 25 mai 2022

Lecture : L'ai-je bien descendu ? de François Bazin

J'ai eu l'occasion, à moultes reprises, de faire sur ce blog l'éloge du pamphlet. Aussi me suis-je précipité sur le livre du journaliste François Bazin L'ai-je bien descendu ?, recueil de textes au vitriol, pépites de l'assassinat littéraire en politique. Ce livre, parus chez Bouquins et sous-titré "Les politiques dans le viseur des écrivains", est une somme de 380 pages où l'on retrouve les grands virtuoses de la plume empoisonnée, depuis Barbey d'Aurevilly jusqu'à Patrick Besson ou Yann Moix.

Si le calembour est la fiente de l'esprit qui vole, selon le mot de Hugo, le pamphlet est lui l'éructation de la conviction mâtinée de l'esthétique du style. Car il n'y a de bon pamphlet que bien écrit : l'élégance y sied bien à la violence. La violence sans l'élégance serait déplorable, le style sans virilité raterait sa cible. Or un bon pamphlet ne peut rater sa cible : Hugo a définitivement détruit Napoléon  III (Napoléon le petit), Jean Cau a blessé Mitterrand, Jean-Edern Hallier  a exécuté Giscard (Colin froid)... Il y faut bien sûr de l'injustice, de l'outrance et de la mauvaise foi, mais on ne s'attaque jamais qu'à des puissants.

Pour en revenir au livre de Bazin, on y retrouve notamment avec plaisir, parmi cinquante autres auteurs et outre ceux déjà cités, Pierre Boutang, Jacques Laurent, François Mauriac, Stéphane Denis (qui signa Manicamp), Françoise Giroud et bien sûr un des plus grands, Léon Daudet... Certes, pour goûter la prose, il convient parfois de se replonger dans l'Histoire de l'époque et de connaitre certains tenants et aboutissants, le politique et le pamphlétaire ainsi que leurs rapports.

Aussi s'en vient-on une fois de plus, à l'heure de la politique contemporaine, à regretter que l'usage du pamphlet soit passé de mode et que les plumes, comme tant d'autres choses, se soient aseptisées. En ces temps électoraux, on se plait à imaginer ce qu'un Daudet, par exemple, eût tiré d'un Macron, d'une Le Pen, d'un Mélenchon, pour ne s'en tenir qu'à eux... Il est vrai que l'ère des tribunaux est venue et que les polémistes n'ont plus le courage d'un Rochefort ("L'homme aux vingt duels et aux trente procès") envoyé au bagne...

jeudi 19 mai 2022

Debray, Tesson : des moments d'un autre temps...

Il est parfois des moments de grâce, qui suspendent le temps et qui balayent les scories du présent contemporain, qui rassurent sur la pérennité de l'intelligence non artificielle. Ainsi la rencontre Régis Debray-Sylvain Tesson, organisée par le Figaro, qui en relate l'essentiel dans son numéro du 16 Mai dernier.

Que retenir de cet échange entre deux écrivains qu'a priori tout pourrait opposer ? L'un est l'homme de l'Histoire, à laquelle il a voulu participer, l'autre est celui de la géographie, qu'il veut particulière : le thème du débat était d'ailleurs "Faut-il changer le monde ou le contempler ?". Pourtant tous les deux ont en commun un même ancrage dans le temps, quand bien même ils ne le revendiquent pas de la même façon.

Ainsi ce moment fût-il de grâce, de subtilité et d'érudition, de culture et d'humanité. De complicité aussi, derrière les narcissismes satisfaits d'eux-mêmes mais pas dupes de leur personnage : cela n'est pas dépourvu de charme, à une époque où il est de bon ton de donner dans la compassion souffreteuse...

Moment de grâce, ai-je écrit, et moment d'un autre temps, quand la culture prévalait. Nul n'a gagné, nul n'a perdu. Et, en ces temps électoraux, concluons par des propos de Julien Gracq, cités par Debray : "Tant de mains pour transformer le monde, si  peu de regards pour le contempler...".

lundi 16 mai 2022

Déjà parus...

 Un petit rappel de mes diverses parutions...

     . L'âme des chemins creux, mémoires d'un sud  Elytis 2021

     . Les Saints des derniers jours  L'Harmattan 2018

     . Le répountchou qu'es aquo ?  Vent Terral 2017  (avec AM. Rantet-Poux)

     . Mona Lisa ou la clé des champs  L'Harmattan 2014

     . Passeport pour le Pays de Cocagne  Elytis 2012

     . Aveyron Croatie, la nuit  L'Harmattan 2011

     . Histoires peu ordinaires à Toulouse  Elytis 2007

     . Histoires peu ordinaires au Cap-Ferret  Elytis 2006  (avec Ch. Oyarbide)

     . Week-end à Schizoland  Elytis 2005

     . La branloire pérenne  Elytis 2002

En vente dans toutes les librairies, chez l'éditeur ou chez l'auteur. Et aussi en e-book chez les titres parus chez l'Harmattan.

mardi 10 mai 2022

BD correcte...

La bande dessinée est un genre majeur de l'édition. C'est également devenu un support reconnu en milieu scolaire. Il était donc logique que le Syndicat national de l'Edition crée en 2020 un programme "La BD en classe". Nous en sommes donc cette année au troisième épisode., bien dans l'air du temps : "Les valeurs d'écologie, d'entraide et de solidarité sont au coeur de cette nouvelle publication, pour sensibiliser les élèves aux défis qui les attendent", nous dit Actualitté.

Il y aura sans doute, pendant encore longtemps, des débats sur l'utilité de la BD à l'école. On peut néanmoins admettre qu'elle soit un bon support à l'éducation, à la création, au travail en équipe. On peut même, si l'on évite les a priori, la croire utile "aux discussions sur des questions éthiques et civiques comme le développement durable ou l'acceptation de la tolérance".

Pourtant, quand on lit "...ces dix-sept BD qui permettent de travailler des axes du programme scolaire tels que la préservation de l'environnement, la solidarité, la responsabilité individuelle et collective face aux défis environnementaux, l'engagement, la coopération et le vivre ensemble." on se sent envahi par la perplexité et une certaine lassitude face à ce verbiage sans surprise, mille fois pré-maché, digne des grandes heures des konsomols...

On ne peut que souscrire, sans excès de pessimisme, à l'immanence des défis annoncés. Pour autant, ces défis seront-ils (uniquement) ceux-là ? Et surtout se poseront-ils comme nos pédagogues l'ont imaginé ? Et les solutions opportunes seront-elles prescrites dans les débats autour des bulles ? 

Mais il faut bien "vivre ensemble"...