mardi 27 février 2024

Et c'est ainsi que Musso est grand...

 Longtemps les écoles ont été nombreuses à porter le nom de grands écrivains (ou de grands artistes), témoignant ainsi d'une grandeur collective qui s'enracinait dans des oeuvres de haute volée, que le peuple s'appropriait et que les chères têtes blondes perpétuaient... Dans les villes, dans les bourgs, dans les villages même, on célébrait ainsi un passé flamboyant et intelligent. Certes il y eut au mitan du XXème siècle la vague des noms de résistants, puis celle des comédiens, des chanteurs, ou des éphémères gloires locales, qui illustrait davantage les avatars de la société du spectacle que d'une culture triomphante, mais les écoles et la littérature tenaient haut le flambeau.

Bref, mutatis mutandis, nous en sommes au point où une école d'Antibes (06) porte désormais le nom de Guillaume Musso. Oui je sais, dit comme ça, ça fait rire... Et pourtant c'est une information très sérieuse du site Actualitté, site de l'actualité du monde du livre. Et cet organe, généralement peu avare de leçons d'insoumission, corrobore le choix de la municipalité azuréenne de donner le nom de cet enfant du pays, en énumérant les chiffres des ventes de cet habitué des têtes de gondole.

Dormez tranquilles, Hugo, Zola, Molière, Camus, Maupassant... mais n'oubliez pas la promo, sous peine de débaptisation fatale. Quant à nous, craignons pour bientôt une Université Virginie-Grimaldi ou une Bibliothèque Mélissa da-Costa.

mercredi 21 février 2024

Manouchian, juste Manouchian...

 Bien sûr, il y a Mélinée, son orpheline, qui l'accompagne ce jour au Panthéon. Mais c'est Missak Manouchian qu'on commémore, ce qu'il fût et ce qu'il fit. Un hommage de plus, dira-t-on, de la part d'un pouvoir qui n'en est pas avare, tardif peut-être mais nécessaire car il nous ramène à une époque où l'engagement ne se faisait pas "par le biais du micro", comme persiflait Brassens...

Certes, il y aurait beaucoup à dire ; sur le curieux arc républicain qui honore le résistant communiste ; sur la fabrication du personnage par le PC ; sur les zones d'ombre qui entourent ce PC lors de l'effondrement du réseau de la MOI ; sur l'éternel débat quant à la responsabilité et au coût des représailles ; et tant d'autres choses ; Et d'ailleurs Manouchian lui-même aurait-il souhaité cet hommage individuel ?

Mais reste avant tout la leçon qu'a donné le petit orphelin arménien que rien ne prédisposait à voler au secours d'une France longtemps frappée de léthargie vis-à-vis du nazisme. Il adhèra à une idéologie, comme d'autres adhèreront à des idées différentes. Il fit preuve de courage, d'autres en firent de même. Pourtant sa sincérité explose dans son attachement à la culture et la langue française, sa littérature et sa poésie.

Alors, derrière les grandes ou petites tentatives de récupération, il y a juste Manouchian. C'est déjà beaucoup. Manouchian le juste. Ah si, quand même, n'oublions pas le poème d'Aragon et la chanson de Ferré...

mercredi 14 février 2024

Les bouquinistes restent à quai !

 Le sujet avait été traité l'été dernier sur ce blog, quant on avait annoncé la déportation des bouquinistes parisiens pendant la durée des JO de l'été prochain. La Préfecture de police de Paris et la Mairie avaient décidé de déménager les caisses vertes qui ornent les quais de Seine, la Préfecture de police par souci de sécurité, la Mairie par souci d'on ne sait quoi. De sorte que cette annonce de déplacement temporaire avait suscité une levée de boucliers, depuis les amoureux de ces étals jusqua'aux professionnels inquiets pour leurs revenus et plus encore pour la pérennité de leurs vieilles installations.

S'en est suivi une chicanerie de six mois, de négociations avortées en récupérations politiques de toute nature. Et alors que se dessinait la fatale défaite du pot de terre face au pot de fer, un coup de théâtre a fracassé le silence de ce jour de grâce du 13 février 2024 : Emmanuel Macron lui-même a annulé le déplacement. 

Cette décision du Président apparait bien sûr comme le fait du Prince. Une fois de plus, dira-t-on, car tout semble désormais se trancher à l'Elysée. En attendant, on se réjouira de voir les quais conserver leurs plus belles fleurs, tout en regrettant que les mesures de bon sens ne soient pas prises plus plus tôt et sans recourir au droit divin...

vendredi 9 février 2024

La Maison des Ecrivains et de la Littérature, hélas...

 On sait que ce pays regorge d'organisations visant à promouvoir la littérature. Avec le succès que l'on sait, diront les mauvaises langues, mais c'est un autre débat. Ainsi la Mél (Maison des Ecrivains et de la Littérature) qui depuis sa création en 1986 durant les années fastes jacklangiennes soutient parait-il "logistiquement et économiquement" des manifestations littéraires parisiennes. Elle est devenue une institution, et siège dans le XVIème arrondissement.

Mais voilà près de dix ans que la crise semble permanente, financière et managériale ; en quelques années la dotation publique est passée de plus de 700 000 euros à 500 000 euros aujourd'hui. Trop peu, crie bien sûr la Mél, qui parle même vis-à-vis du Ministère de la Culture de "forfaiture" : le ridicule ne tue plus depuis longtemps. Si la Mél évite régulièrement la banqueroute elle n'a guère infléchi sa gestion, particulièrement opaque, peut-être pas malhonnête mais pour le moins "déconnectée", en tout cas difficile d'accès même pour des vice-présidents... Mais bien sûr, argue la structure, "la Mél est menacée parce que la littérature est menacée". CQFD. Le Conseil d'Administration, quant à lui, enregistre démission après démission, avant d'avoir peut-être des comptes à rendre surladite gestion.

Le nombre des adhérents à cette Asso, car c'est une simple association, culmine à 240, tout aussi célèbres que les pétitionnaires contre Tesson. Il n'en demeure pas moins une dizaine de salariés, à l'efficacité incertaine. Normal, "la souffrance des équipes" illustre "un système totalitaire" et les "abus de pouvoir" imputés à la direction.

On l'aura compris, la pétaudière est joyeuse. Et coûteuse en deniers publics. Et probablement pas la seule à dilapider ceux-ci au profit de quelques uns, à en croire les gens bien informés. Mais d'autant plus irritante que pendant ce temps-là, loin des lumières, de nombreux bénévoles font beaucoup mieux avec beaucoup moins.