mardi 5 juillet 2022

Lecture : Plateforme, plus de vingt ans après...

Plateforme est paru en 2001. Qu'en disait-on à l'époque ? Michel Houellebecq était déjà célèbre, après Extension du domaine de la lutte (1994) et Les Particules élémentaires (1998). Il avait déjà inventé son style, un style dans lequel la critique de ce début de siècle voyait surtout le sexe et la provocation, le cynisme et un peu d'humour, et le diagnostic d'une société finissante. Houellebecq original, certes, et perspicace, sans doute, mais plombé par un style blanc et la facilité de la provoc... Et, comme souvent, on voyait le doigt davantage que ce qu'il montrait.

Plus de vingt ans plus tard, relire Plateforme permet de situer dès cette date la dimension qu'allait prendre l'auteur, dont c'est sans conteste l'oeuvre la mieux maitrisée. Y éclatent son talent prémonitoire et sa finesse d'analyse d'une société malade, pour ne pas dire agonisante. Quelques personnages noyés dans l'industrie touristique éclairent la déliquescence d'un monde où ni l'entreprise ni l'individu  ne sont capables d'élaborer du sens. Quant à l'attentat islamiste évoqué à la fin du livre, il a été pensé par MH un an avant le World Trace Center...

Les vingt années passées ont fait oublier les critiques pudibondes de l'époque ; quant au sens du marketing de l'écrivain, il a fait plus fort depuis. Pour ce qui est de la trame de l'ouvrage, la compétition économique (et sexuelle) promue sous forme de subversion, le temps n'a fait que conforter les thèses de Houellebecq.

Si Plateforme est le meilleur livre de celui-ci, il est aussi celui qui illustre de façon éclatante la dimension visionnaire du trublion des lettres. Depuis il y a eu du bon et du moins bon, mais la stature de Michel Houellebecq s'est imposée.

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