jeudi 30 mai 2024

Lectures : La vraie vie de bohème, de Jacques Lambert

 Le titre complet du livre, De Montmartre à Montparnasse, la vraie vie de bohème, 1900-1930 donne une idée plus précise de son sujet. Son auteur, Jacques Lambert, est un ancien journaliste, amateur d'art et collectionneur, biographe de Gen Paul et de Kisling. Alors encore un ouvrage sur ce sujet, me direz-vous ? Certes, mais qui a le mérite de le traiter de manière très fouillée et réaliste, sinon exhaustive. Le livre est bourré de détails, de chiffres, de dates, d'adresses, etc..., parfois d'intérêt relatif, souvent très utiles. D'où il ressort la réalité de la fameuse vie de bohème qui auréole cette période si riche et qui, quelle que soit la nostalgie qu'elle ait pu susciter a posteriori, s'éloigne sensiblement de ce qui a parfois (souvent) été écrit sur le sujet : on est loin d'Aznavour.

On y retrouve tous les protagonistes, artistes et écrivains, du moins ceux dont la postérité a retenu le nom, ou le pseudonyme. Leurs espoirs, leurs errances, leurs succès ; leurs amours, leurs égoïsmes, leurs générosités. Loin des clichés habituels, l'ouvrage est dense, érudit, bien écrit, instructif, et pourtant fort agréable à lire. Il est paru voilà dix ans, avant une édition revue et corrigée en 2019. Il n'a donc pas la chaleur d'un essai qui vient de sortir du four mais il gagne à être connu, et surtout lu.

vendredi 17 mai 2024

Plumes olympiques

 Vous n'ignoriez pas que lorsque le baron Pierre de Coubertin initia les Jeux Olympiques modernes, il avait en tête l'objectif d'un corps sain dans un esprit sain, et le souci, très en vogue à l'époque, de revivifier par l'hygiène sportive un pays (déjà) décadent. Mais peut-être ne saviez-vous pas que figuraient aussi dans ces JO nouvelle formule des épreuves d'architecture, de peinture, de sculpture, de musique et de littérature ? Certes aucun des vainqueurs n'a laissé de grand nom passé à la postérité, mais on notera qu'en 1924 le Jury de ces épreuves artistico-littéraires n'était pas dépourvu de prestige : Barrès, Valéry, Claudel, Maeterlinck, Anna de Noailles, d'Annunzio, et d'autres, le tout présidé par le fougueux Jean Richepin qui s'était bien assagi... Bref, on l'aura compris, parallèlement aux jeux du stade se déroulaient des joutes plus culturelles.

On peut retrouver tout cela dans le livre de Louis Chevaillier Les Jeux olympiques de la littérature (Grasset). En attendant de le lire, on retiendra que voilà un siècle on n'aurait pas imaginé un projet ambitieux sans y intégrer une dimension intellectuelle ou culturelle. Alors qu'aujourd'hui il ne viendrait à l'idée de personne de renouveler la chose.

Pour autant, même de nos jours, la culture n'est pas complètement absente : avant même que ne débutent les JO de Paris, nous avons déjà eu droit au rappeur Jul et bien sûr à Aya Nakamura, et le meilleur est sans doute à venir.

mardi 14 mai 2024

Henri Gougaud, le dernier conte.

 C'est à l'aube de ses 88 ans qu'il s'est envolé vers les grands espaces où vivaient déjà ses contes. J'avais commenté ici-même deux de ses ouvrages : La Confrérie des Innocents (2021) et J'ai pas fini mon rêve (2020), où il retraçait sa vie, lui qui fut chanteur, parolier, homme radio, écrivain et conteur, et dont les textes qu'il offrit à Jean Ferrat, Juliette Gréco ou Serge Reggiani donnent une idée du talent.
L'enfant de Villemoustaussou laissera une oeuvre pétrie d'Histoire et d'histoires, de philosophie et de mysticisme, et une pensée qui est parfois complexe à saisir, mais l'homme qui était derrière était lumineux, en fils du peuple qui s'ouvrit de grands horizons sans oublier d'où il venait. Il était le chantre de l'épopée cathare, de la langue d'Oc et de l'esprit du sud, mais sa culture n'avait de frontière ni géographique ni thématique.

C'est sur le site Actualitté que j'ai appris sa mort, c'était le 6 mai. Hormis un papier dans l'édition de l'Aude de La Dépêche et de l'Indépendant, je n'ai rien vu ni  entendu qui parle de lui ;  la grande presse nationale l'a oublié. Ainsi va la vie. Peu importe, peut-être : "Perdu d'avance est l'homme qui ne suit pas ses rêves", écrivait-il. Sans doute est-il  encore à poursuivre les siens...

vendredi 10 mai 2024

De Pivot à Apostrofes...

 Pivot, bien sûr, dont on ne pouvait passer le trépas sous silence. Maintenant que les thuriféraires se sont tus, on n'ajoutera pas d'éloge supplémentaire, fut-il mérité, car tout a été dit. Bernard Pivot était un personnage français, donc populaire : les Verts, le Beaujolais, la dictée montraient une star restée simple ; les livres en faisaient un intello. Deux images que la France aime bien. Etait-il un critique débonnaire, ou un présentateur de télé cultivé ? sans doute les deux. Il ne bouscula pas grand-chose de l'ordre établi, mais intéressa 4 millions de téléspectateurs à la production littéraire. Et puis il y eut Soljenitsine, Nabokov, Bukovski... 

Certes c'était, du moins à ses débuts, l'époque des Chancel, Decaux et quelques autres. Pourtant, c'est depuis la fin d'Apostrophes qu'on le regrette, quand les audiences cumulées de ses "successeurs" (on peine à écrire ce mot) culminent à une audience dix fois moindre. Et parce que nous en sommes rendus à l'Apostrofes du sketch des Inconnus, que l'on retrouvera avec plaisir sur la toile... Mais comme il devient de plus en plus mal vu de dire que c'était mieux avant, nous allons en rester là.