samedi 26 avril 2025

Littérature : Sarkosy, tome II

 Dans la famille Sarkosy, vous n'avez pas oublié Nicolas, l'ancien Président de la République ; vous l'avez d'autant moins oublié qu'il continue à défrayer régulièrement la chronique, judiciaire désormais. Les plus méritants d'entre vous se souviendront du lecteur des Roujon-Macquart ou de Roland Barthès, et plus généralement de l'abyssale culture de l'activiste politique.

Mais revenons à l'actualité. Voilà que le rejeton Louis, que son père mettait en avant pour sa com, ou à qui il voulait confier de solides responsabilités (à 22 ans et sans le moindre diplôme), le rejeton Louis donc est arrivé à maturité ; il grenouille pour trouver une sinécure électorale, court les plateaux de  télé amies et perpétue la modestie familiale. Ainsi annonce-t-il qu'il va publier en mai un ouvrage sur... Napoléon. Peu importe les ambitions-marketing qui se nichent derrière, l'essentiel est ailleurs, le vécu aussi, confie-t-il au Canard enchainé (23/04/25) : "Même si c'est vrai qu'à écrire c'était chiant à en mourir ! Sur Napoléon, vous avez toujours un connard pour affirmer l'inverse de ce que vous venez d'écrire... Il a fallu vérifier la véracité de toutes les sources !"...

Sans commentaire. On attendra donc le mois de mai pour savoir si le nègre était bon. Mais avec de tels "auteurs", l'avenir du Livre, de la littérature, de l'Histoire et de l'écriture s'annonce aussi flamboyant que celui de la Crimée et du Donbass réunis.

mardi 15 avril 2025

Lecture : De ciel et de cendres, Henri Gougaud

 Ce sera le dernier livre d'Henri Gougaud, puisque l'écrivain  occitan est parti rejoindre le monde de ses contes voilà bientôt un an. J'ai souvent évoqué sur ce blog l'œuvre de l'enfant de Villemoustaussou, ses débuts de chanteur, ses talents de parolier pour les plus grands, la magie radiophonique de ses contes, son œuvre protéiforme et universelle.

Son dernier roman De ciel et de cendres (Albin Michel) reflète assez bien celle-ci, pétri de romanesque, d'Histoire et de philosophie. L'Histoire tout d'abord, avec ses personnages sortis du Registre d'inquisition de Jacques Fournier, évêque inquisiteur de Pamiers de 1317 à 1326, de sinistre mémoire et futur Benoit XII. Le romanesque, qui fait vivre ses personnages sous la plume de l'auteur, nourri de contes et de légendes chers à Gougaud. La philosophie enfin, voire le mystique, dans lequel il est difficile de ne pas voir la sensibilité de l'auteur lui-même, à travers les digressions et les propos du greffier Jabaud qui relate cette période où l'inquisition piétine les dernières braises cathares.

De cette étrange et belle alchimie ressortira pour la postérité l'esprit et l'œuvre d'un auteur un peu oublié, alors qu'il portait en lui l'âme du sud et de la  terre d'òc, et au delà l'universalité des grands espaces des contes et légendes déjà évoqués. Je ne lui connais pas de successeur : 2024 aura été une triste année.

jeudi 10 avril 2025

Lecture, statistiques, déclin

 Chaque année, notre célèbre et glorieux Centre National du Livre publie ses études, visant à saisir le rapport entre les Français et la lecture. Il en ressort généralement de plates évidences, mais on les exploite au mieux : ainsi, à l'occasion du Covid avait-on conclu à un renouveau de la lecture. J'avais écrit ici-même, à l'époque, ce que j'en pensais. Et, las, en 2023 on constatait un retour à la normale. En 2024, la réalité est sans pitié et les chiffres imparables : sans surprise le déclin se poursuit.

Le seul chiffre positif concerne les plus de 65 ans, qui sont 2 % plus nombreux à lire. Mais chez les 35-49 ans c'est moins 8 %. Entre les deux (50-64 ans), la génération qui a vécu le passage de l'écrit vers l'écran, c'est un écroulement de moins 13 %... Par ailleurs, seuls 56 % des Français s'estiment être des lecteurs réguliers ; et 20 % d'entre eux ne lisent jamais. La baisse concerne autant le papier que le numérique. Il semble que la banalisation du télétravail, qui a dopé l'usage des écrans, ait impacté également les loisirs, donc la lecture ; il a aussi diminué l'usage des transports en commun, un des lieux privilégiés de lecture !

Bref, l'affaire est historiquement mal engagée. Ajoutons à cela un aspect plus qualitatif : la décrépitude est atténuée par la consommation des mangas et comics, ce que l'on savait déjà (merci au pass-culture). A cela s'ajoute le développement de la new romance (version moderne des séries Harlequin de jadis) pour 14 %... Certes il a toujours existé une indispensable production populaire mais, en un mot comme en cent la littérature se meurt.

Heureusement pendant ce temps là, le CNL fait des statistiques.

jeudi 3 avril 2025

Lectures : A pied d'œuvre, de Franck Courtès

 Le livre de Franck Courtès, A pied d'œuvre, (Gallimard 2023), nous conte les tribulations de Courtès Franck, qui fut pendant plus de vingt ans un photographe star et payé en conséquence, jusqu'à ce que la saturation le prenne, comme il l'avait relaté dans La dernière photo (Lattès) : il lâche la photographie pour l'écriture, d'autant que ses premiers écrits ont été prometteurs. Jusque là tout va bien, mais la réalité prosaïque le rattrape : les droits d'auteur sont bien maigres. Il lui faut donc travailler à côté, lui qui ne sait rien faire en dehors de ses créations. Il va plonger dans l'univers des petits boulots, à la recherche de quelques billets nourriciers, et en découvrir la férocité en même temps que la déstructuration sociale et personnelle qui va avec. Dans ce monde ubérisé sans pitié "Je suis à la misère ce que cinq heures du soir en novembre sont à l'obscurité : il fait noir mais ce n'est pas encore la nuit"...

Difficile de savoir précisément dans ce récit autobiographique ce qui est authentique, romancé voire imaginé. Mais on entend très bien le créateur en quête d'absolu se confronter à une réalité sociale (le libéralisme, l'incompréhension, le regard des autres...) qui se fiche de lui et de ses choix.

Rien de bien nouveau sous le soleil de notre temps, mais c'est bien écrit et plein d'humanité.