lundi 16 mai 2016

Travelling sur Marcel Aymé

Retour sur des billets récents, où j'évoquais les bouquinistes et, un peu plus tôt, Marcel Aymé. Or il se trouve que, précisément chez un bouquiniste, j'ai trouvé un exemplaire jauni de Travelingue (de l'anglais travelling, francisé par l'auteur).
Ce roman, d'un comique et d'une férocité comme on ne sait plus en faire (ou qu'on n'a plus le droit d'écrire) se situe pendant les évènements du Front populaire mais il est, si j'ose dire, furieusement contemporain. Aymé y croque allègrement les turpitudes des bourgeois, des prolos, des énervés et des généreux, de tout ce qui fait le quotidien des familles. C'est aussi une satire désopilante et de ce que l'on n'appelait pas encore la gauche caviar, au profit des "petites" gens pas assez savantes ni riches pour se mentir. Entre le snobisme de la bourgeoisie, surtout petite, et la bêtise de l'extrême-droite, les portraits sont acides. On pourrait croire, dit comme cela, à quelque cliché, mais le propos de MA est trop subtil pour tomber dans les idées toutes faites. En tout cas, on comprendra aisément le tombereau d'ordures qui s'abattit sur l'auteur à la Libération, de la part d'une intelligentsia qui sut se reconnaitre.
J'ai déjà décrit tout ce qui fait la saveur de Marcel Aymé : son humour, son acuité, son amour des vrais gens, sa subtilité, son détachement. Et en lisant Travelingue, on se plait à imaginer un tel ouvrage...actualisé dans notre XXIème siècle. Mais, quand en prennent pour leur grade les politiques, les syndicats, les bourgeois, le peuple, les féministes, les homos et d'autres, serait-il seulement publié ?

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