mercredi 14 décembre 2016

Magyd Cherfi, ceux qu'il aime, et eux non plus...

J'ai déjà évoqué sur ce blog le livre de M. Cherfi, Ma part de gaulois (Actes sud), du temps où il se trouvait nominé pour le Goncourt. On sait que le leader de Zebda y évoquait, avec la subtilité qu'il a souvent montré, ses années d'enfance dans la banlieue toulousaine des Isards, où il tranchait quelque peu d'avec ses congénères. Mais le livre était empreint d'une nostalgique tendresse à leur égard.
Sauf qu'il a commis une erreur de débutant, ce qu'il est d'ailleurs en littérature, celle qui consiste à conserver le prénom de quelques uns de ces camarades, "parce qu'il les adore". Parmi eux, un ancien petit gitan, aujourd'hui vendeur de voitures d'occasion, qui s'estime "sali et outragé" et qui porte plainte pour diffamation. Entre nous, les quelques lignes qu'il évoque ne resteront ni dans l'histoire de la littérature, ni dans le dictionnaires des injures. Mais passons.
Même si les gitans d'aujourd'hui n'ont que peu de choses à voir avec ceux d'hier, on peut croire qu'il leur reste un sens exacerbé de l'honneur...A moins qu'ils n'aient envie d'argent, ce qui serait moins romantique. Bref, quelle que soit sa motivation, notre gitan a porté plainte contre l'auteur, qui selon lui le présentait comme "vulgaire, grossier et illettré", ce qu'il estime ne pas être. Et notre gaulois d'être accusé de "monter sur la tête de la misère pour son propre profit"...
Au risque de faire beaucoup d'honneur aux uns et aux autres, je repense avec ce fait divers aux mésaventures de Pierre Jourde, dont certains voisins n'avaient pas bien compris la déclaration d'amour qu'il leur avait faite dans Pays perdu (voir sur ce blog en 2012), et qui le lui avait fait comprendre avec des arguments d'un autre temps. Ici, les moeurs sont banlieusardes, au sens où on l'entend aujourd'hui ; les motivations et les attitudes sont tout aussi contemporaines.
On aura compris qu'il devient de plus en plus difficile d'écrire sur les autres, sur l'Histoire, sur la société, sur la vie. Et il se trouve des avocats pour encourager (on n'ose écrire initier) ce type de procédures. La liberté d'expression, dont il font à juste titre si grand cas, en sortira sûrement grandie...

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