dimanche 13 décembre 2020

Culture abyssale...

... et culture au bord de l'abîme. Tout le monde vous le dira ces jours-ci, la culture est sacrifiée. Les larmes coulent sous les masques de nos gouvernants ; les unes de la presse rivalisent de belles envolées mélodramatiques. Tous les interviewés des trottoirs se déclarent choqués du sort réservé à la "culture".

Pas plus que de la littérature, on ne fait de la politique avec de bons sentiments, et il est à craindre que ce flot lacrymal ne soit contre-productif, à trop en faire ; les acteurs de la culture n'ont jamais si populaires que cela : trop payés, trop feignants, farfelus, bons à rien... du moins quand il s'agit de les aider (cf les crises des intermittents). D'autre part, la boulimie culturelle affichée par les français peut prêter à sourire quand on sait le sort réservé par ceux-ci aux petits commerces (librairies, disquaires) ou institutions (musées, orchestres, troupes) en déficit chronique. Nul doute que le monde d'après sera celui de la ruée vers l'intelligence...

Pourtant, avec ou sans la com' consensuelle, la réalité "objective" est là : ce secteur représente 670000 emplois directs et rapporte 2.3% au PIB, 47 milliards d'euros, autant par exemple que la filière agro-alimentaire et plusieurs fois celle de l'automobile. A quoi s'ajoute un intérêt stratégique majeur, en nos temps si modernes : il n'est pas délocalisable.

Seulement voilà, la culture, la culture dans notre France est avant tout un outil de production (animation, concerts, festivals) qui valorise d'autres secteurs (tourisme, restauration...) ; or un outil, quel qu'il soit, qui ne tourne pas ne demeure pas longtemps opérationnel, et on ne le remet pas en place sur un clacquement de doigts, fussent-ils présidentiels. Et si l'on considère qu'un tiers des intervenants sont des travailleurs indépendants (donc sans Assedic en cas de besoin) on comprendra l'extrême vulnérabilité de ce "monde de la culture".

En clair, la France est-elle, une fois encore, en train de massacrer un de ses plus beaux fleurons ? on mesure de nos jours les effets de la désindustrialisation entamée il y a un demi-siècle. Jusqu'à présent, on se consolait en compensant avec le tourisme et la culture, ce que le monde entier nous envie... Mais demain ? que restera-t-il après la crise nommée Covid ?

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