jeudi 28 février 2013

Jean-Claude Carrière, paysan d'oc


L'actualité, océan aux flots sans cesse renaissants, nous livre simultanément deux films de qualité : "Syngué Sabour-Pierre de patience" (A. Rahimi) et "L'artiste et son modèle"(F. Trueba), qui ont en commun non seulement une critique unanime, mais encore (ceci expliquant peut-être cela) le même scénariste, Jean-Claude Carrière.
Longtemps, comme tout un chacun, j'ai connu l'auteur prolifique qui alignait collaborations avec les plus grands (Etaix, Bunuel, Schlöndorff, Rappeneau, Haneke...) pour des titres d'anthologie, et oeuvres de haute volée (Le Maharabhata, La controverse de Valladolid...). Jusqu'au jour où j'ai "rencontré" JC Carrière dans un livre de second plan, dans sa bibliographie : Le vin bourru.
Cette autobiographie de sa jeunesse à Colombières-sur-Orb (Aude), entre vignes et châtaigniers, ne pouvait certes que me toucher, trop proche de la mienne. Mais ce fût une réelle émotion, et il fallait sans doute beaucoup de talent à l'auteur pour que ses mots éveillent bien plus qu'une nostalgie plus ou moins folkloriste ; ainsi quand il évoque son incapacité, aujourd'hui encore, à quitter une pièce sans en éteindre la lumière : tous les petits paysans du monde d'avant comprendront ce qu'il en est.
Jean-Claude Carrière a tutoyé les vrais étoiles du monde présent ; je me souviens de l'article d'un hebdomadaire relatant son interview du dalaï-lama, et disant en substance :"Ce n'est pas la première fois qu'un interviewer apparait plus intelligent que l'interviewé, mais à ce niveau de pensée c'est rare." Il a rencontré bien des civilisations, indienne, mexicaine, maya, thibétaine, iranienne, et d'autres... A chaque fois pourtant j'entends la petite note du paysan occitan qu'il fut, qu'il est encore, au pied des murs de pierre sèche qu'il aime tant édifier...
Un cinéaste mexicain a récemment réalisé à son propos un documentaire intitulé "Carrière, 250 mètres", allusion à la distance qui, à Colombières, sépare maison natale et cimetière. Saisissant parcours. Mais 250 mètres, c'est sans doute à vol d'oiseau...

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