lundi 19 septembre 2016

Démocratie déplumée

Il arrive que mes lectures et tel ou tel article de presse se croisent heureusement, pour le plus grand plaisir de ce qui me sert de réflexion. Ainsi dans le TéléObs de cette semaine, JC Guillebaud s'interroge fort à propos : "La liberté des médias, qui fut longtemps le principe fondateur de la démocratie, serait-elle en train de devenir son principe destructeur ?"... Il évoque la complexité du phénomène médiatique, la sémiotique et l'impérialisme de l'image, la tyrannie du profit, la défaite de la raison, l'hystérisation permanente des foules. Tout ce qui aboutit on le sait à un système fou (faute de garde-fous) et glouton, qui s'auto-alimente, qui vit de l'instant et dans l'instant, sans savoir où il va et où il est, ni comment s'organiser.
JCG pose le problème d'une hégémonie médiatique contre le journalisme, ce qui me parait accorder beaucoup de mansuétude aux "journalistes" contemporains, et se demande "La souveraineté d'une opinion hystérisée en permanence ressemble-t-elle encore à une démocratie ? Rien n'est moins sûr."  Euphémisme, dirais-je. Quant à ceux qui objecteraient à cela l'idée d'une "démocratie d'opinion", cela me fait penser à la vieille blague qui courait dans l'ancienne URSS à propos de l'expression "démocratie populaire": deux mots, deux mensonges...
Il se trouve que dans le même temps, mes lectures présentes se nourrissaient du "Bréviaire du journalisme", de Léon Daudet, paru en 1936. Ce livre, nonobstant quelques idées de l'auteur (qui à 68 ans s'était quand même bien assagi) est intéressant dans ce qu'il raconte, dans un style inimité, un demi-siècle de vie de journaliste et de la presse, fait d'investigation, de campagnes, de culture, de polémiques, de débats et...d'information. Soit à peu près le contraire de l'univers médiatique évoqué plus haut.
Les plumes ont vécu. Ainsi va le monde, et le progrès devient furieusement moderne.

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