jeudi 15 février 2018

Michel Déon, chevalier errant...

Dans la série "Mauvais temps pour les écrivains classés à droite", après Céline et Maurras, nous en arrivons à Michel Déon. On sait que ce dernier est décédé à Galway il y a quelques mois, et que depuis sa fille essaie de poser ses cendres dans un cimetière parisien. "Impossible !, avait décrété la mairie de Paris : il n'est pas mort à Paris." Rappelons que juridiquement rien en effet n'oblige une municipalité à héberger un mort qui n'a pas décédé sur son sol ou qui n'y a pas de concession familiale. Mais rien non plus ne l'empêche de le faire.
Après un long imbroglio administratif, on croyait l"affaire classée lorsque Bruno Juillard, premier adjoint et chargé de la culture, fut mis au courant, se déclara surpris et annonça que l'affaire serait réglée en 10 jours. Ce délai ne fut pas nécessaire avant que Anne Hidalgo en personne ne claironne que non Michel Déon ne serait pas inhumé à Paris, et qu'il n'y aurait pas d'exception. L'obscure conseillère en charge des cimetières crut bon d'en appeler au premier article de la Déclaration des Droits de l'Homme.
Rarement cet argument excessif n'aura été employé à plus mauvais escient ; certes les hommes naissent libres et égaux, théoriquement du moins, mais tous ne meurent pas grand écrivain et Académicien français. Et alors qu'on croyait être de mauvaise foi une lecture politique de la chose, voilà que cela s'avère de plus en plus évident. Car il existe des précédents, comme par exemple Susann Sontag, née et morte à New-York en 2004, et enterrée à Montparnasse sous Delanoé. Il est vrai que celle-ci, politiquement et culturellement, représentait à peu près l'antithèse de Déon.
Alors peut-on, sans être un passionné de Déon, et encore moins de ses idées, le reconnaitre comme un écrivain majeur de la deuxième partie du XXème siècle et se rappeler qu'il fut académicien ? A l'heure où Paris se veut ville ouverte pour tout migrant (qu'on saura bien enterrer, le cas échéant) et où les pouvoirs s'acharnent sur les écrivains morts, on pouvait, me semble-t-il,  lui souhaiter de trouver dans la capitale où il vécut 50 ans quelques centimètres carrés pour un repos éternel... Mais il est vrai que la vie éternelle n'est pas garantie par la Déclaration des Droits de l'Homme.

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