lundi 29 avril 2019

Notre Drame de France

La France est ainsi faite que tout y est matière à chamaillerie, nobles causes ou faits divers. En l'occurrence le sujet en vaut la peine : comment restaurer Notre-Dame de Paris après le drame. Personnellement ce travers français ne m'est pas a priori antipathique, ni sur le fond (peu de pays au monde sont capables de s'emplâtrer sur un tel thème) ni sur la forme lorsqu'elle est avenante (on connait mon intérêt pour les pamphlets). Pourtant, à ce stade du débat non seulement je ne me suis pas fait d'opinion définitive, mais je suis encore aux prises avec une certaine perplexité.
D'abord parce que l'affrontement entre les tenants d'une restauration à l'identique et les partisans d'un ajustement architectural contemporain serait plus transcendant s'il n'était pas surfait pour des raisons essentiellement partisanes, donc quelque peu caricaturales. Les "conservateurs" arguent de la culpabilité de n'avoir pas su, pour notre génération, transmettre Notre-Dame comme nous l'avions reçue, n'osent pas toucher à un symbole de huit siècles et demi et réclament bizarrement  qu'on refasse telle qu'elle était la flèche de Viollet le Duc, d'un néogothique pour le moins discutable, qui date de... 1860.
En face, ceux qui entendent profiter de l'occasion pour laisser une trace de la vie de la cathédrale, tout en la rendant plus "sécure", comme on dit de nos jours. Les "conservateurs" se veulent fidèles et respectueux du spirituel. Les autres se veulent pragmatiques, modernes et inscrits dans l'Histoire. Les premiers fustigent une volonté profane et macronienne de marquer un passage ; les seconds agonisent la droite et l'extrême-droite réactionnaires. On l'aura compris : les premiers sont proches de l'opposition, les seconds de la majorité.
On aura compris aussi que, parti de haut, le débat a baissé de quelques crans.
Alors, plutôt que de vouloir reconstruire Notre-Dame "plus belle encore" et en moins de cinq ans ou de vouloir en réponse dénoncer un narcissisme présidentiel et moderne, serait-il inenvisageable de laisser la parole aux experts, quels que soient les travers qu'on peut leur connaitre, et d'attendre des avis sensés ? et d'adopter des postures modestes face aux siècles qui nous contemplent ?
Dans mes jours d'optimisme, je me prends à croire qu'il doit être possible de bâtir du beau, du spirituel, du contemporain, du grand,... dans le même geste, car c'est bien in fine notre regard qui donnera à l'objet architectural sa dimension.

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