dimanche 8 septembre 2019

Gilet jaune : à moitié condamné, à moitié regretté...

La presse s'en est largement faite l'écho la semaine dernière : l'un de mes presque voisins a été condamné à quatre mois de prison avec sursis pour avoir affiché sur sa camionnette "Flic suicidé, à moitié pardonné". Cette affaire ne m'a jamais passionné -des blaireaux qui répètent des "bons mots" sans les comprendre vraiment on en voit tous les jours- mais son épilogue me semble doublement attristant.
Sur le fond, la condamnation ne me parait pas très sévère, et autant il est grave de le faire sur un représentant de l'ordre autant il est inique et indécent de se réjouir d'un suicide : on peut être bête et méchant, et la tension autour du mouvement des Gilets jaunes n'excuse rien.
En même temps, comme il convient de dire ces temps-ci, on constate l'incapacité de notre époque à tolérer, sinon comprendre, le second degré : la justice traite la matière au premier degré, et dès lors bien des choses deviennent répréhensibles. Or en l'occurrence, et quoi qu'on puisse penser de sa valeur humoristique, il me semble que le "bon mot" que notre crétin a repris pouvait se relativiser, je dirais même s'interpréter ou se mettre en perspective, si l'on se réfère à une vieille tradition satirique ou pamphlétaire...
Sinon, combien de chansons de Brassens ou de Brel, par exemple, tomberaient de nos jours sous le coup de la loi, depuis le classique "Mort aux vaches" jusqu'aux émasculations de Brive la Gaillarde ? Et quel éditeur accepterait de prendre le moindre risque pour publier une oeuvre trop persifleuse ? Combien de morceaux d'anthologie seraient aujourd'hui morts nés ? Et d'ailleurs combien le sont ?
On peut se réjouir que la justice oblige chacun à prendre ses responsabilités, au lieu de bêler en troupeau. Mais je ne suis pas sûr que la démocratie, et tout ce que l'on met derrière ce mot, progresse beaucoup si cette justice refuse de distinguer la lune et le doigt...

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