vendredi 30 août 2019

Destins

La gloire s'enracine souvent dans la modestie : cette évidence m'est revenue en tête il y a quelques jours au hasard d'une déambulation dans les gorges du Viaur, la rivière récemment évoquée sur ce blog. Plus précisément, sur un lieu perdu d'un pauvre plateau de l'Albigeois aux confins du Rouergue. Un croisement de petites routes, un maigre hameau, trois fermes isolées, dont la Nougarié.
Une stèle qui rappelle que l'on n'est pas n'importe où, même si l'on est au milieu de nulle part.
Ici vit le jour, dans la deuxième partie du XVIIIème siècle, un homme plein de vie. Né dans ce Ségala paysan pour y être pauvre et berger, mais lettré par le curé de l'endroit, il fit partager à une jeunette locale sa pulsion de vie, l'engrossa mais refusa de l'épouser ; contraint par la justice, il dédommagea la belle et fuit la contrée. Albi, puis Toulouse, puis Tours, Paris et les lumières, comme secrétaire au conseil du Roi et quelques autres prébendes. Pendant ce temps, son frère est accusé d'avoir assassiné une jeune fille. A tort, certes, mais guillotiné quand même en lieu et place d'un notable.
Une maison, proche de la route, garde le souvenir de celui qu'elle a vu partir sous d'autres cieux, mais elle n'est pas la seule ; il n'était ni le premier ni le dernier à s'en aller ; peut-être serait-il aujourd'hui enfoui dans les limbes de l'Histoire si, pour faire oublier son patronyme de Balssa encombré de trop de faits de justice, il ne l'avait changé en Balzac. Son fils Honoré y adjoint une particule et lui donna aussi la gloire.


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