mercredi 13 janvier 2021

Livres, communication de crise et enfumage.

Les amateurs de consensus peuvent s'en réjouir : nul esprit sensé ne contestera la situation de crise dans laquelle se trouve le pays pandémié. Reste à évaluer les différents impacts, depuis les problèmes courtermistes de trésorerie jusqu'aux déstructurations aux conséquences définitives : ce n'est pas l'objet de ce blog. Pour l'heure on essaiera de trier les informations dont on nous abreuve, et notamment celles qui démontreraient que tout ne va pas si mal.

Ainsi apprenait-on que "l'édition" ne se plaindrait que d'une baisse de 2% en 2020, et que les librairies n'auraient perdu que 3 % de leur chiffre d'affaires, voire moins pour les grosses. Ce résultat relativement encourageant s'expliquerait par le sursaut des belles âmes volant à leur secours entre deux confinements, le seul bémol étant que cette mobilisation aurait surtout profité aux best-sellers. Autrement dit le traditionnel effet Goncourt, le livre acheté par des gens qui n'achètent jamais de livre pour les offrir aux gens qui n'en lisent jamais... On se réjouira certes que ces succès permettent aux éditeurs de publier aussi d'autres oeuvres moins chanceuses, mais il n'est pas sûr que la littérature (ou la culture, comme on voudra) ait beaucoup gagné aux succès de librairie des Obama, des recettes de Lignac ou des âneries de je ne sais plus quelle influenceuse, qui trônent en haut des ventes.

Plus représentatif de la situation de la filière du livre, le rapport de la Fédération interrégionale du Livre et de Lecture (FILL) qui, dans le même temps, fait état du désarroi des auteurs, largués entre éditeurs, organisateurs de manifestations et Etat, (la moitié d'entre eux s'interroge sur sa pérennité en 2021) et de faits têtus : 88 % des éditeurs indépendants constatent une baisse de commandes (- 60 % de CA en Paca, par exemple) et presque autant repoussent leurs projets... Et ce n'est là qu'un aperçu de ce qui se passe vraiment.

Gageons que nous allons entendre longtemps de ces déclarations enthousiastes, propres aux situations de crise et destinés à soutenir le moral des troupes, avec des vessies en lieu de lanternes. Pendant ce temps, la réalité fait son oeuvre.

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