mardi 9 février 2021

Jean-Claude Carrière, ibi deficit orbis...

On dit qu'il est parti paisiblement, dans son sommeil. A l'image de cette sérénité qui le caractérisait. Bunuel disait de lui "C'est un petit paysan qui s'émerveille de tout ce qui lui arrive"...

On ne fera pas ici la rétrospective de son oeuvre, immense et proche des plus grands (Bunuel, Forman, Malle, Brook, Deray...), vous la retrouverez dans les journaux ou sur Wikipédia. Mais la vie de Jean-Claude Carrière est de celles qui m'ont marqué, comme je l'ai déjà écrit sur ce blog (voir Le vin bourru , juin 2017).

J'avais découvert dans ce livre les treize premières années de sa vie, dans une famille de vignerons de l'Hérault finalement contraints à l'exil. Cette enfance rurale et occitane ressemblait beaucoup à la mienne, et c'est sans doute cette émotion qui m'a conduit jusqu'à lui. Son regard n'avait rien de folkloriste, sa réflexion à la fois analytique et philosophique prenait une hauteur ensorcelante. Quand il évoque la nature, l'apprentissage, l'agriculture, la mort, les animaux, le vin, les pierres sèches qui bâtissaient son enfance, il le fait avec la simplicité, la justesse et la subtilité qui sont l'apanage des seuls grands.

Cette civilisation paysanne qui l'a construit retrouve sous sa plume une dimension qui pourrait clôre bien des débats, en renvoyant bien des modes contemporaines à ce qu'elles sont, c'est-à-dire peu de choses. Peut-être parce qu'entre celles-ci et l'altitude de Carrière il y a ce vécu, ce bagage qui s'appelle une culture et qui irriguera l'intégralité de son oeuvre.

Il va retrouver ses ancêtres dans le joli petit cimetière sur les hauteurs de Colombières-sur-Orb. Avec lui s'éteint sans doute un monde, celui où un petit paysan pouvait s'émerveiller de tout depuis l'enfance jusqu'au temps de la sagesse...

Merci Monsieur.

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