dimanche 6 novembre 2022

Académie française : fauteuils en stock, petit prix

Clémenceau affirmait qu'il est ici bas deux choses parfaitement inutiles : la prostate et le Sénat. Il eut pu, sans férocité particulière, y rajouter l'Académie française. Aussi estimable et prestigieuse que soit cette institution, de décès en décès elle se retrouve aujourd'hui avec cinq fauteuils à (re)pourvoir, et cela n'est pas une sinécure.

Tenons-nous en au seul fauteuil numéro 19 (celui de Jean-Loup Dabadie), qui accueillit, parmi d'autres postérieurs, ceux de Boileau ou de Chateaubriand. On votait ces jours-ci pour désigner un heureux élu, sachant que la majorité absolue nécessaire à l'élection est de 13 voix. Et là, patatras ! le plus populaire des candidats a culminé, au quatrième tour, à 11 voix, contre 8 à son challenger, comme on ne dit pas à l'AF. Bref, les Immortels en place sont sévères vis-à-vis de ceux qui postulent.

Précisons à ce stade que les deux impétrants étaient Benoit Duteurtre et Frédéric Beigbeder. On peut comprendre les réserves des académiciens. Une première tentative vaine avait eu lieu en mai dernier, avec comme candidats Olivier Barrot et Frantz-Olivier Giesbert. Déjà on pouvait imaginer la perplexité des hommes en vert.

Peut-être notre Académie française devrait-elle s'interroger sur les vocations qu'elle suscite, et surtout sur celles qu'elle ne suscite pas de la part d'écrivains ou d'hommes de lettres reconnus. Les blessures narcissiques, dans une époque qui en compte tant, ne suffisent plus toujours à légitimer une candidature. Et encore moins à porter la langue française.

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