vendredi 5 janvier 2018

Altitude et littérature

Affirmer que deux ou trois générations de consommateurs ont considérablement contribuer à raboter le niveau des produits culturels "populaires" vous vaut à coup sûr d'être traité de vieux croûton nostalgique et adepte du "c'était mieux avant".
Assumons, non sans délice... L'exemple le plus parlant est sans doute celui de la chanson : Brel, Brassens, Ferré, Ferrat, Nougaro et d'autres trouveraient-ils aujourd'hui la moindre major accueillante ? D'évidence non. Et encore n'évoquerons-nous pas ici les injonctions morales propres à notre époque qui les auraient fait assurément condamnés... Mais l'écriture est-elle mieux lotie que la chanson ? Pas davantage, nous l'allons voir.
La presse s'en est faite l'écho. Un certain Serge Volle a prouvé la chose, en envoyant comme manuscrit à dix-neuf éditeurs un extrait de "Palace", un ouvrage de Claude Simon, phare du nouveau roman et très accessoirement Prix Nobel de Littérature en 1985. Sept éditeurs n'ont pas répondu, douze ont dit non. Aucun ne semble avoir flairé l'entourloupe, ce qui en dit long sur la culture des éditeurs ; l'un d'eux a néanmoins argumenté (chose rare) sa réponse : "Les phrases sont sans fin, faisant perdre le fil au lecteur. Le récit ne permet pas l'élaboration d'une véritable intrigue avec des personnages bien dessinés"...
Propos qui ont au moins le mérite de pouvoir se passer de commentaire ironique. "Aujourd'hui, c'est le concept de livre jetable qui fait fureur", conclut S. Volle. Ce n'est pas à proprement parler un scoop, mais la démonstration est irréfutable.
On pourra certes ne pas regretter le nouveau roman, illustration d'une époque où les sciences humaines étaient reines, et toutes les fumées acceptées. Mais le canular de Serge Volle marcherait trop souvent pour qu'on ne se sente plus triste qu'amusé...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire