dimanche 28 janvier 2018

Nutella et circenses

L'époque, on le sait, n'est pas avare de faits dont on se demande s'il convient d'en rire ou d'en pleurer. Ainsi ces derniers jours les émeutes de la faim dans des hypermarchés du nord et de l'est : des gens se sont battus pour des pots de Nutella...
Il serait d'ailleurs intéressant de superposer la carte géographique de ces échauffourées avec une carte électorale, mais c'est sans doute là du mauvais esprit. Plus sérieusement, si ces évènements sont consternants, certaines réactions, à ambition politique, ne le sont pas moins. Il y a ceux qui nous expliquent que les problèmes de pouvoir d'achat obligent les consommateurs pauvres à se comporter de la sorte (pour du Nutella ?!) ; ceux qui proclament que ces pauvres ont bien le droit de se faire plaisir (avec du Nutella ?!) ; ceux qui, par habitude, voient de la part des "élites" qui rigolent un mépris de classe...
Ceux là sont de mauvaise foi ou ne comprennent rien... Nul de sensé ne peut contester les difficultés de certaines populations, ni que ces difficultés puissent aliéner leur comportement social, ni que vouloir faire plaisir à ses enfants (et encore ne suis-je pas sûr que toutes ces cochonneries soient destinées aux enfants) soit dans le coeur de tous les parents. Mais que signifie faire plaisir à ses enfants, ou à soi-même, en les détruisant physiquement, mentalement et intellectuellement ?
Car il faut bien appeler les choses par leur nom. Derrière les noisettes de l'étiquette se cache une monstruosité de gras (et quel gras), de sucre (et quel sucre), d'huile de palme, etc... propres à déclencher d'abord des addictions (que ces bagarres illustrent assez bien) puis toutes les maladies que l'on sait. Alors bien sûr on me dira, à juste titre d'ailleurs, la malbouffe, le marketing, la pub, l'industrie agro-alimentaire, etc...
Mais serait-ce faire offense au bon peuple de le croire capable, a priori du moins, de conscience, de sagesse et d'esprit critique ? et donc de le renvoyer à sa responsabilité de consommateur ? Qui peut dépasser le formatage de la pub et de l'aliénation consumériste, si ce n'est chacun avec sa conscience d'adulte ? Car face au tsunami de la pub les sources d'information critique existent bel et bien, y compris sur les grands média populaires. Encore faut-il être encore capable de penser et de se méfier du plus facile. Et qu'on ne nous bassine pas avec des histoires de pouvoir d'achat : qu'est-ce qui coûte le plus cher, la pâte à tartiner ou du pain avec une barre de chocolat ?
Le problème ici est moins la diététique que l'honneur de l'individu. Pas de culture du goût, nous dit-on pour expliquer la carence de celui-ci. Pas de culture du tout, plus sûrement. Comme quoi on en revient toujours là...

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