mercredi 15 mai 2019

Verte campagne, ou comment perdre une voix...

Pendant les campagnes électorales aussi, il arrive des choses dont on ne sait s'il convient d'en rire ou d'en pleurer. Ainsi l'autre jour, voguant au gré des humeurs de ma zapette, je tombe sur un débat sur C8, dans l"émission de Pascal Praud ; celle-ci s'appelle "punchline" et illustre assez bien l'air du temps, vaguement beauf et réac. Quelques invités s'invectivent, s'interrompent, parlent en même temps, rivalisent de slogans simplistes et accessibles : bref un débat (?) pour divertir, davantage que pour se faire une opinion ou élever sa pensée.
C'est là que s'est fourrée Claire Nouvian, militante écologiste connue, parait-il, et embarquée en 78ème position sur la liste Glucksmann, dont elle est une des têtes d'affiche. J'ai pris l'émission en marche mais assez tôt pour constater qu'elle n'était pas dans cette disputatio pour débattre mais pour conférencer, si j'ose dire, du nom de ces activités, généralement rémunératrices, qui occupent nos penseurs contemporains. Elle récite donc le discours habituel sur le réchauffement climatique qui va tuer la planète par la faute de l'homme. Manque de chance, ou comme de bien entendu, ses contradicteurs ne sont pas sur la même longueur d'onde. Et c'est là que les choses dérapent : on sait bien qu'un politique vise plus à convaincre le téléspectateur-électeur qu'à changer l'avis de ses opposants, mais un débat a sa logique, c'est justement de débattre en échangeant des idées différentes. Quant on objecte à Madame Nouvian, à tort ou à raison, que si la modification climatique de puis trente ans est incontestable, cela ne nous dit rien de la durée et de la portée historique du phénomène, elle ne le supporte pas : "Mais vous êtes dingues !" Malgré la puissance de l'argument, le camp d'en face insiste et reste prudent, en conséquence, sur la responsabilité de l'homme dans ledit phénomène. "Mais vous êtes tarés !" vocifère l'égérie verte. L'échange (?) devient bruyant, on entend "c'est vous qui êtes dingue", "religieuse", "rétrograde", "folle"... dans ce pugilat verbal. De son air de chattemite, Praud invite à se calmer, et souhaite qu'on puisse parler du climat sans être "hystérique". "Ah, c'est parce que je suis une femme !" hurle l'héroïne. Je vous fais grâce de la suite.
On pourrait rire de tout cela ; pourtant quelque chose me fait peur. Je ne sais pas si Madame Nouvian sortait d'un apéritif trop arrosé, ou si elle s'est trompée dans le dosage de son nouveau médicament, si elle s'était donné du courage avec un produit illicite ou immoral, ou si elle est toujours comme ça. Mais si je m'en tiens à sa prestation ce n'est pas conférencer que j'aurais du écrire, mais prêcher. Car toute sa réthorique repose sur un dogme de départ, un présupposé qui ne saurait être mis en doute. Car le dogme est sacré, d'ailleurs si on ne le considérait pas comme tel, il pourrait bien s'effondrer tout seul ! En gros, l'argumentation commence par "Puisque les choses sont ce qu'elles sont", à partir duquel on déroule l'argumentation : malheureusement rien ne prouve que les choses sont ainsi. Certes Madame Nouvian et une certaine frange écolo ne sont pas les seuls à procéder ainsi, mais une idéologie qui a fait du terme "sceptique" une insulte puis une injure ne me dit rien de bon. Et on est est à présent à "climato-négationniste", entendu dans la bouche de notre candidate : et là on a beau savoir que tout ce qui est excessif est dérisoire, on est au bord de l'abjection.
Si cela présentait le moindre intérêt j'ajouterais que la liste Glucksmann faisait partie de celles pouvant encore prétendre à ma voix le 26 mai, car justement Glucksmann me semblait porteur d'idées de débat. Mais là...
J'ai souvent, dans ce blog, dénoncé les fantasmes totalitaires de certaines idées à la mode et bienpensantes. On a connu la totalitarisme brun et le totalitarisme rouge. Désormais on pourrait craindre également le vert. Contrairement à ce qu'on dit, les goûts et les couleurs se ressemblent souvent.

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