Si le charme de l'horizon est de reculer au fur et à mesure que l'on avance, celui de l'actualité est de passer en même temps qu'on la découvre. C'est ainsi que l'Histoire se fabrique et qu'elle nous éclaire sur notre temps présent... et sur son actualité.
Au hasard de mes relectures, je parcours ces jours-ci Les intellectuels français et la guerre d'Espagne (Editions du Félin 2019), de l'universitaire toulousain Pierre-Frédéric Charpentier. Un pavé de 700 pages, qui n'échappe pas aux travers des historiens de sourcer en bas de page la moindre citation, ce qui alourdit souvent le propos. Cela étant, c'est un remarquable travail qui retrace l'activité de nos intellectuels pendant la guerre civile espagnole de 1936 à 1939. Le sous-titre du livre Une guerre civile par procuration mériterait à lui seul un débat, mais il témoigne de l'importance de ce que fut cet évènement chez les écrivains, les journalistes voire les artistes durant la période. On a retenu les plus célèbres, Malraux, Chamson, R. Rolland... à gauche, Claudel, Drieu, Farrère, Brasillach... à droite, sans oublier ceux qui portèrent haut l'honnêteté intellectuelle, comme Bernanos, Mauriac ou Simone Weil. Mais derrière ceux-là il y avait une armée de journalistes et d'auteurs qui écrivirent sur le drame, chaque camp étant traversé par des contradictions ou des divisions qui annonçaient les crises à venir : fractures internes à gauche entre pacifistes et interventionnistes, entre communistes staliniens et révolutionnaires, divergences radicales à droite entre chrétiens progressistes et conservateurs. La presse d'alors se donnait les moyens de sa mission.
Le résultat est est que l'on était loin de l'univers de nos actuels plateaux de télévision où se pressent les commentateurs du moment. Certes l'image a remplacé l'écrit, et l'instantané ne laisse plus la place à la moindre analyse structurée, mais où est passée l'ambition ? Les drames d'antan n'étaient pas plus beaux que ceux d'aujourd'hui, mais la pensée des hommes avait davantage d'intégrité ou moins de cynisme.
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